Métal Urbain, 1977
METAL URBAIN, une musique dure, une attitude radicale. Se considérant à tort ou à raison comme une élite, ils paraîtront antipathiques à plus d’un. Ils n’hésitent pas à agresser ou mordre, les écologistes entre autres, dans l’un de leurs récents titres.
D.L. Comment et autour de qui s'est formé Métal Urbain ?
M.U. - Zip Zinc et Eric Débris créèrent Métal Urbain. Puis est arrivé Rikky Darling, suivi de Clode Panik qui d’ailleurs, n’aimait pas ce que nous faisions à l’époque ! Zip et Rikky sont aujourd’hui remplacés par Nancy Luger et Hermann Schwarz. Depuis le début, un seul but : la subversion, sans aucun compromis !
D.L. - Pourtant, vous avez participé à l’immonde «Blue Jeans» ?
M.U. - Le fait d’y participer n’est pas un compromis. Le compromis aurait été de faire les gusses, de répondre aux questions débiles de Lafont, de se frotter à Sardou. En un mot, nous refusons que quelqu’un ait une action sur nous ; nous voulons exactement le contraire ! La télé, on en a besoin. Mais on s’est pointés en expliquant qu’on venait faire notre truc ET RIEN D’AUTRE. S’il avait fallu faire les putes, sauter comme des sauterelles sur un play-back, on se serait tirés. Par contre, refuser de participer à cette émission aurait été idiot. « Paris Maquis » un après-midi, c’est subversif. il faut s’infiltrer, prouver notre existence.
D.L. - Le fait d’être le groupe le plus violent / subversif vous a-t-il déjà attiré des ennuis ?
M.U. - Vis-à-vis des rockers, oui, comme tout groupe punk. Et vis-à-vis des maisons de disques, il est évident qu’elles ont la trouille de nous signer. Cette image de « Sex Pistols français » qu’on nous a collée dès le début nous dessert. Pourtant, on ne joue plus « Anarchie en France » depuis 8 mois.
D.L. - Pas de problèmes au niveau de vos textes ?
M.U. - Pas encore, car pour l’instant on continue à nous prendre pour « un groupe punk / rock de plus ». Télé ou radio nous passent entre un Sardou et un disco... le cocktail ! Si, dans le futur, on a plus d’impact, il est évident que les média s’apercevront qu’on ne s’arrête pas au simple niveau de la chanson.
D.L. - Vu le peu de fric que doivent rapporter les concerts et les deux 45 tours déjà sortis, comment arrivez-vous à subsister ?
M.U. - On en est encore réduits à vivre chez nos parents et pointer au chômage, bricoler à droite, à gauche. On ne veut pas tourner sans arrêt, les galères, les tournées, les salles monstrueuses. Il n'y a pas de motif valable : les interminables tournées serviraient simplement à faire vendre notre disque tout en faisant faire des économies de publicité à la firme responsable ! On préfère jouer peu souvent, mais bien.
D.L. - Aucune grosse compagnie ne s’est encore intéressée à vous ?
M.U. - Nous avons été contactés, mais par des gens aux principes bizarres : « on vous fait une fleur en vous signant, alors on ne peut pas en plus vous donner de l’argent ». Quand tu touches 5 % ou 8 %, qu’on refuse de faire de la pub tant qu’il n’y a pas X milliers de disques vendus, et jamais d’avance, c’est dramatique. Alors, en France, on n’a plus de manager, on se débrouille nous-mêmes. En Angleterre Rough Trade travaille à la perfection, mais là-bas, les mecs sont professionnels.
D.L. - Avec le recul, comment pourriez- vous définir aujourd’hui le terme de « punk » ?
M.U. - C’est un mouvement créé par les Pistols qui, un jour, on décrété que le rock était devenu une institution, chiante comme la mort et qu’il fallait CREER quelque chose de nouveau, englobant forme de musique, fringues, attitudes. C’est rapidement devenu la merde, car il suffisait d’avoir les cheveux courts et les épingles pour décrocher un contrat d’enregistrement ! Le mouvement, honnête à l’origine, a rapidement dégénéré. Quant à nous, nous refusons CATEGORIQUEMENT de jouer dans des salles de plus de 3000 personnes. C’est un vol collectif lorsqu’un mec, au millième rang, non seulement ne voit rien, mais en plus se fait buter à la sortie. Le punk-rock, c’est une réaction contre toutes les stars établies, contre les magouilles du show-biz. Seuls les Pistols étaient restés purs. Des mecs comme Jam ou Boomtown Rats, c’est déjà la même chose que Zeppelin, ils n’ont déjà plus qu’un seul but : vendre du disque. Les Pistols se sont peut-être séparés parce qu’ils ne veulent pas devenir les Stones des années 80.
D.L.- Les groupes français n’ont pas l'air de s’aimer entre eux, non ?
M.U. - Normal ! En Angleterre, c’est pareil. Quand tu es dans un groupe, quand tu crois en ce que tu fais, tu ne peux pas apprécier ce que font les autres. Généralement, les mecs sont prêts à faire n’importe quoi pour réussir.
D.L. - Vous ne pensez pas que toute forme de rock est une subversion ?
M.U. - Pas du tout ! Stones ou Zeppelin, c’est l’anti-subversion. Quant aux groupes français qui chantent en anglais, c’est bien une preuve qu’ils n’ont rien à dire. Où est la subversion si le public ne comprend pas les textes ? Les groupes, plus ils ont de moyens, plus ils se ramollissent !
D.L. - Est-ce que ça n ’est pas dramatique d’obtenir en fait une meilleure réaction de la part du public anglais qui, pourtant ne comprend pas vos textes ?
M.U. - Si justement, il les comprend ! « Panik », c’est international. De même, en France, un môme de 16 ans comprend « Anarchy in the U .K.», sans problème. L’énergie, elle est dans la musique plus que dans le texte. Tu sais, même les Anglais comprennent difficilement les paroles de Rotten.
D.L. - Quelle importance apportez-vous à l’image d’un groupe ?
M.U. - Primordiale ! Il faut que le public flashe sur les fringues, puis la musique, et enfin les paroles. Le public paie pour voir un spectacle, pas une poubelle ! Le mot d’ordre punk, c’est « créez tout par vous-mêmes, vos vêtements, votre attitude, votre musique, vos fanzines ». C’est une stimulation de l’esprit et du corps.