Jacno, janvier 1980
Ancien guitariste et cofondateur du groupe français Stinky Toys, Jacno a mis récemment sur le marché l’un des disques les plus intéressants, de par son côté simple, mais surtout innovateur, de ces derniers mois. Une rencontre s'imposait afin de vous présenter cette future vedette en solo...
- Ce disque sur Dorian confirme-t-il définitivement la fin des Stinky Toys ?
- Oui, dans une certaine mesure. Disons que chacun ressentait le besoin d'enregistrer séparément, de son côté. Et puis nous ne pouvions plus continuer en tant que groupe.
- Crois-tu aujourd'hui toucher un public totalement différent ou bien le même, qui suit l'évolution ?
- Les deux. Je crois, bien sûr, toucher un public nouveau, mais aussi les anciens fans des Stinky Toys car, finalement, le second album n'était pas très éloigné de ce que je fais aujourd'hui.
- Indépendamment de toute nostalgie, ne crois-tu pas que la musique d'aujourd'hui vieillit plus mal qu'il y a dix ans ?
- C'est assez exact, mais ça dépend tout de même des morceaux. Lorsqu'il y a une trouvaille, on réécoute le disque avec plaisir... Mais il est évident qu'il n'y a pas beaucoup d'innovations dans la musique depuis quelques années.
- On a mille fois demandé aux musiciens français pourquoi ils choisissaient de chanter en anglais ou dans leur propre langue. Cette fois, il y a sur ton disque quatre titres instrumentaux (sur cinq morceaux !) . N'y a -t-il pas une arrière pensée dirigée vers le marché international ?
- De toute façon j'ai toujours voulu toucher le marché international. Ça n'a pas marché pour des raisons de distribution, principalement. Dans ce nouveau disque, le seul titre chanté l'est en français. S'il sort à l'étranger, on le réenregistrera.
- Où te situes-tu, musicalement parlant ?
- En fait, je me réfère toujours aux années 60, au niveau de l'esprit... Disons que je fais du "sixties" à la sauce moderne.
- Du "Jean-Michel Jarre new-wave" ?
- Tout au moins par le côté facile et accrocheur, la mélodie de "Rectangle", par exemple, peut toucher autant, de gens que "Oxygène"... Commercialement, c'est effectivement ce genre de créneau, bien que je n'aime pas du tout ce que fait Jarre ! Mais ça ne me gêne pas trop, les étiquettes ! Aux débuts de Stinky Toys, j'ai été catalogué punk, ça m'ennuyait un peu car a l'époque, tout le monde l'était !
- Quelques mots sur ce nouveau label, Dorian ?
- Pour l'instant, je trouve qu'ils ont sorti d'excellents produits : il y a le groupe français Artefact, un 33 T produit par John Cale... Quant à moi, je pense produire, artistiquement parlant, pour ce label.
- Ce 45 T géant semble destiné principalement aux discothèques. Crois-tu qu'elles soient devenues le média le plus puissant du moment ?
- Dans mon cas, je n'ai même pas d'électrophone. Tous les disques que j'entends, c'est justement dans les clubs... mais au départ, je ne pensais pas que mon disque aurait pu y marcher !
- Te reconnais-tu certaines influences ?
- Cela va de Françoise Hardy à Giorgio Moroder, en passant par les Shadows... même si ce n'est pas évident à la première écoute, car c'est adapté au goût du jour. Je ne crois pas qu'il y en ait d'autres, car, à part ces trois- là, et John Cale aussi, je n'ai pas écouté grand-chose !
- Tu as plus ou moins laissé tomber la guitare ...
- Je ne suis plus intéressé par le fait de composer des morceaux, car la guitare par elle-même n'apporte plus grand-chose de neuf.
- Le côté simple et efficace de ce premier disque solo ne marque-t-il pas un point final, une expérience difficile à renouveler ?
- Au contraire, je ressens cela comme un nouveau départ. Les nouveaux morceaux que j'ai composés me semblent à la fois plus élaborés et plus commerciaux.